Le harcèlement sexuel d’ambiance reconnu par la Cour d’appel de Paris

Peut-on parler de harcèlement sexuel lorsque la salariée qui dit en être victime n’est pas la cible directe des auteurs ? Oui, c’est possible ! C’est ce qu’a récemment décidé la Cour d’appel de Paris en retenant la notion de harcèlement sexuel d’ambiance, s’inscrivant ainsi dans le sillon tracé il y a quelques années par la Cour d’appel d’Orléans. L’occasion pour moi dans cet article de revenir sur la notion de harcèlement sexuel, d’agissements sexistes, avant de me pencher sur le harcèlement sexuel d’ambiance. Cour d’appel de Paris, 26 novembre 2024, n° 21-10408.
Deux personnes discutent dans un environnement professionnel, illustrant un cas de harcèlement sexuel d’ambiance.

Table des matières

Quand parle-t-on de harcèlement sexuel ?

Pour l’article L. 1153-1 du Code du travail, il y harcèlement sexuel :

  • en présence de propos ou de comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui soit portent atteinte à la dignité d’un salarié en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
  • lorsqu’un salarié subit les propos décrits ci-dessus de la part de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’entre elles, et ceci alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
  • même en l’absence de  concertation, lorsque les auteurs ont conscience que leurs propos ou comportements caractérisent une répétition ;
  • en présence de toute forme de pression grave exercée dans le but d’obtenir un acte de nature sexuelle, au profit de l’auteur ou d’un tiers. Dans cette situation, le harcèlement sexuel est reconnu même en l’absence de répétition.

Et le sexisme, fait-il l’objet de dispositions dans le Code du travail ?

Oui ! Le sexisme et les agissements qui le caractérisent sont eux aussi sanctionnés par le Code du travail et n’ont pas leur place dans l’entreprise (comme à l’extérieur d’ailleurs !). On parle d’agissement sexiste en présence d’agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant (article L. 1142-2-1 du Code du travail).

Le harcèlement sexuel d’ambiance, en quoi consiste-t-il ? Peut-il être dénoncé auprès de l’employeur et des juges ?

La Cour d’appel d’Orléans, dans sa décision du 7 février 2017 (n°15/02566) explique que le harcèlement environnemental ou d’ambiance est une situation où, « sans être directement visée, la victime subit les provocations et blagues obscènes ou vulgaires qui lui deviennent insupportables » et considère qu’un tel harcèlement peut être qualifié de harcèlement sexuel.

Dans sa décision récente de novembre 2024, la Cour d’appel de Paris utilise à son tour le terme de harcèlement d’ambiance pour sanctionner l’employeur pour harcèlement discriminatoire.

Pour mieux comprendre ce qui se cache derrière un harcèlement d’ambiance ou environnemental, faisons un détour sur les faits dans ces deux affaires :

  • dans la 1ere : en présence de la salariée, blagues vulgaires et grivoises entre collègues masculins, propos vulgaires et offensant à l’égard des femmes, photos de femmes dénudées affichées sur un mur visible par tous les salariés…
  • dans la 2de : même topo ! blagues sexistes, échanges entre collègues masculins de mails à teneur sexuelle et comportant des images de femmes dénudées accompagnés de messages graveleux, images visibles par tous du fait de la configuration des bureaux (open-space).

Dans les 2 cas, les salariées n’étaient pas directement visées par les propos et agissements : peu importe, il y a harcèlement sexuel dès lors qu’il y a eu atteinte à la dignité des salariées, et création d’un environnement hostile, dégradant, humiliant et offensant !

Ces agissements n’ont pas leur place en entreprise !

Si vous en êtes victime, ou témoins, vous pouvez agir. Voici quelques conseils :

  • Prenez en note les faits que vous subissez ou constatez, en indiquant les dates, les personnes présentes. Cela pourra vous être utile si jamais la justice devait être saisie ;
  • Ne restez pas seule et faites-vous accompagner : rapprochez-vous des élus ou délégués syndicaux de votre entreprise, ceux-ci disposent de moyens pour agir ; prenez contact avec un syndicat ou une association spécialisée dans les violences faites aux femmes ; ou bien saisissez un avocat ;
  • Alertez l’employeur (par écrit, mail ou courrier !) : celui-ci étant tenu d’une obligation de sécurité et de prévention, il ne peut rester sans réagir ;
  • Et alertez l’inspection du travail.

Des actions en justice peuvent également être envisagées pour sanctionner, selon la juridiction saisie, l’employeur et/ou les auteurs.

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